La rentrée de notre compatriote est épistolaire

Qui a l’heur de nous plaire

D’une longue, très longue lettre adressée à son père -maton dans une prison ardennaise-  Raphaël lui révèle son changement d’identité.

Raphaël est Nora- il le sent, le sait depuis sa plus tendre enfance. Sa mère aussi, décédée quand l’enfant avait deux ans, qui le soutient de son ombre bienveillante.

D’une route balisée d’embûches, d’incompréhensions mais surtout de belles rencontres, de solides appuis et de quelques mamans de substitution – sa grand-mère, Corinne, son institutrice, Anna, sa vigilante fée, Madame Barbieri, sa logeuse, Stella, Mo, Maya, Exaucée,… et de la pratique médicale du docteur Thomas, Nora réalise sa lente et  vitale transition

 » J’aime le regard qu’Anna pose sur moi. Il ne me juge jamais. »

Encore lui faut-il trouver sa voie de vie- ce sera dans la …voix, le chant et la pratique d’une discipline exigeante qui lui permettra de la moduler en conformité avec son identité.

La révélation de la voix de Klaus Nomi, la découverte de la Strange music agissent comme de puissants adjuvants.

La pandémie,  aussi, qui lui permet d’éluder un long temps les retrouvailles physiques avec son père.

Il ne reste qu’à faire confiance à ce père, tant démuni de repères sociologiques, culturels qu’empli d’amour pour …son fils pour qu’il accepte la mutation de ce dernier.

Profondément ancré dans une toponymie bruxelloise et réalité identitaire belge, le roman s’appuie, à l’évidence, sur une recherche documentaire d’envergure.

Qui en rend le propos subtil, efficace et vécu.

Strange, Geneviève Damas, roman, Ed. Grasset, août 2023, 180 pp