L’allègement des vernis

C’est un premier roman et un coup de maître.

Il ne fallait rien moins que le brio, l’inventivité, la plume de Paul Saint Bris pour affronter le génie de Léonard de Vinci – hôte de 1516 à  1519, du Clos Lucé des Saint Bris, à Amboise  –  et l’aura sensible, réactive et universelle qui entoure La Joconde.

Empruntant à la fois les voies du documentaire – vous en saurez un brin sur l’œuvre du Maître florentin et les techniques des restaurations de tableaux –  et de la satire urbaine – on ne touche pas impunément à une icône planétaire-  l’écrivain affiche une fantaisie propre à faire rire aux larmes ….Monna Lisa.

Et une précision de vocabulaire tout aussi précieuse.

L’enjeu du roman?

Le lifting de Lisa Gherardini

« Réfléchissez-y: en allégeant ses vernis, la peinture retrouvera son éclat originel. Redonner ses vraies couleurs à La Joconde, réparer les outrages du temps, c’est créer un événement planétaire qui vous assurera la venue de millions de gens empressés d’admirer sa photogénie nouvelle. »

C’est dire comme la pression est forte sur le chef d’Aurélien, directeur au musée du Louvre et spécialiste des peintures de la Renaissance italienne et française.

D’autant que le quadragénaire n’entend pas se faire dicter décision et conduite pour de simples objectifs commerciaux

Et qu’il lui faut trouver la perle rare – en matière de restaurateur – pour restituer l’œuvre, sans l’altérer.

S’engage un débat sur le statut d’artiste du restaurateur et la contestation italienne de la propriété du Louvre

De la Ministre de la Culture à Homéro, le technicien de surface et ses chorégraphies d’autolaveuse, en passant par L’Italie, MacKinsey, les media et Gaetano Casani, restaurateur de génie et de Florence, une foultitude d’acteurs sont concernés par le chantier de restauration. A tous les échelons.

Gageons que vous le serez aussi

Apolline Elter

L’allègement des vernis, Paul Saint Bris, roman, Ed. Philippe Rey, janvier 2023, 352 pp

Billet de faveur

AE :  La fiction analyse avec mordant et précision les enjeux de la restauration d’une œuvre aussi emblématique que La Joconde. Est-ce une invitation larvée à un vrai ravivement ? Si on exclut de le confier à un illuminé, bien entendu….

Paul Saint Bris : Si dans mon roman la restauration de la Joconde est d’abord un prétexte pour interroger notre rapport à l’art, à la beauté, aux images, ainsi que notre relation contrariée au changement, je suis heureux de susciter une réflexion sur l’état du chef-d’œuvre de Léonard. La décision d’une intervention revient naturellement à ses dépositaires : le Louvre et ses conservateurs. Pour ma part, j’y suis favorable ; la Joconde nécessite ce « ravivement » dont vous parlez. Remarquez que ce mot n’est pas anodin. Je crois effectivement qu’en l’allégeant des vernis oxydés qui l’obscurcissent et la jaunissent, on redonnerait à Monna Lisa un nouveau souffle de vie. J’incite vos lecteurs à retourner la voir dans la salle des États pour se faire leur propre idée. La voilà l’invitation !

 

 

 

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