C’est le récit d’une imposture gigantesque, stupéfiante, sidérante que nous livre la journaliste Sonia Kronlund.

De celles qu’on n’oserait inventer tant elle est incroyable

Et pourtant elle est vraie et son héros- si l’on peut dire – vit, impuni, savourant, jubilant, les innombrables récits de vie qu’il s’est inventés, qu’il a imposés à ses partenaires en prenant des risques inouïs

Ces derniers font partie du jeu, de la jouissance.

Contactée en 2017 par une certaine « Marianne »  – sans doute un prénom d’emprunt – la documentaliste va investiguer, durant quelque six ans, pour reconstituer le plus fidèlement possible, le parcours de Ricardo – son vrai prénom –  un mythomane hors normes, né au Brésil en 1979.

Cumulant  jusqu’à quatre vies conjugales… simultanées, Ricardo offre à chacune de ses partenaires, Marianne, Carolina, Nicole, … une identité radicalement différente. Prénom, nom,  biographie, famille,  psychoiogie pays d’origine, métier, …varient drastiquement en fonction de ses victimes.  Il est tour à tour Alexandre (Alejandro) chirurgien thoracique, Ricardo, Daniel, Jeremias,…. policier, militaire à Gaza, photographe de guerre, ingénieur chez Peugeot, pilote de ligne, ….tous métiers qui exigent des absences fréquentes,  répétées et propices aux doubles vies.

Sa motivation n’est pas d’ordre strictement financier ni sexuel même s’ils estoque de l’argent à ses femmes – pas des sommes énormes  – et essaime quelques progénitures en passant;  elle est psychologiquement plus complexe Et c’est cette psychologie que Sonia Kronlund va traquer, tenter de comprendre, au terme d’une longue, minutieuse et captivante enquête, qui la mène au Brésil, en Pologne, … et à rencontrer Ricardo en personne.

Une investigation qui connaît de singulières résonances avec son propre parcours de vie

Une lecture hautement recommandée.

Apolline Elter

L’homme aux mille visages, Sonia Kronlund, récit, Ed Grasset, janvier 2024, 180 pp