« J’habitais en ce temps-là un pays dont on se demande avec étonnement aujourd’hui s’il a vraiment existé »
Ce pays, c’est le Liban et l’époque est celle des Trente Glorieuses – entre 1945 et 1975 – , ces années d’après-guerre qui le virent connaître une certaine opulence, une insouciance certaine,avant d’être dévasté par la guerre civile .
« Mais j’y retrouve aussi les prémices de ce qui allait emporter le pays, (… ) «
Le jeune Charif vit chéri, au sein d’une famille bourgeoise – « Mon père possédait des magasins de tissus et de draps dans les vieux marchés de Beyrouth. »- et s’adonne avec fougue à sa passion pour Napoléon, les rois et héros mythiques de ses lectures, se liant fièrement d’amitié avec Walid Abdessalam , fils du dernier roi des ïles du Verseau.
« Mon insoucieuse distraction des choses de mon temps m’aura fait regarder avec superbe tout ce que l’histoire produisait autour de moi, tout ce qu’elle remuait sans cesse de guerres et de conflits. »
Posé en observateur proustien – il en épouse aussi le phrasé – du monde frivole qui bascule autour de lui, l’écrivain décrit avec précision ses phases de déni, son lent avènement aux relations amoureuses.
« Et puis d’un seul coup, le monde qui servait de décor à tout cela s’écroula. J’en avais été un témoin distrait, mais le bruit qu’il provoqua en s’effondrant me fit lever la tête et ce que je vis alors n’était plus qu’un univers de violence et de mort, et c’est de celui-là que je suis devenu contemporain. »
Le récit devient alors initiatique roman de passage qui voit se clore l’enfance et l’adolescence du narrateur, son envol pour la France
« L’histoire était en train de se faire sous mes yeux, elle n’était plus dans les livres mais elle n’avait pas le grand lyrisme que lui conféraient la littérature ou les récits trop lisses des historiens que j’aimais. »
Le nom des rois, Charif Majdalani, récit, Ed. Stock, août 2025, 216 pp