La carte postale

« Parmi le courrier, très ordinaire en ce début de mois de janvier, elle était là. La carte postale. Glissée entre les enveloppes, l’air de rien, comme si elle s’était cachée pour passer inaperçue. »

Déposée à la poste du Louvre, un samedi de tempête hivernale de janvier 2003, LA carte postale représente l’Opéra Garnier.  Elle est anonyme, se bornant à empiler d’un tracé malhabile quatre prénoms- Ephraïm Emma, Noémie, Jacques.

Il s’agit des  Rabinotvitch, arrière-grands-parents, grand-tante et grand-oncle respectivement, de la narratrice, déportés et  décédés à Auschwitz en 1942.

L’unique survivante de la famille est sa grand-mère Myriam, échappée aux arrestations de Forges parce qu’elle vivait alors à Paris, mariée à Vicente Picabia, fils de Francis et de Gabriële (née Buffet – cfr sur ce site, la chronique de  Gabriële, magnifique biographie que lui consacrent Anne et Claire Berest,Ed Stock, 2017) 

Myriam décède atteinte de la maladie d’Alzheimer et la carte repose dans les archives de Leila, la mère d’Anne et Claire Berest

Elle en sera soudain extraite en 2019, tandis qu’Anne, approchant de la quarantaine est saisie par une remarque enfantine antisémite, perpétrée en l’école de sa fille Clara

Elle veut tout connaître de ses origines familiales maternelles.

Leila avait déjà rassemblé de grands pans de l’histoire tragique de sa famille: ils constitueront la trame d’un récit détaillé de leurs origines, de leurs résidences et vies et  le point de départ d’une enquête passionnante qui permettra de retrouver le (la) scripteur de la carte postale.

Et de prouver une nouvelle fois l’irréductible impact des tragédies familiales sur le destin des descendants :

« Tu peux appeler cela de la psycho-généalogie ou croire en une mémoire des cellules… mais moi je ne parle pas de hasard. Je suis née un 15 septembre, j’ai fait mes classes préparatoires au lycée Fénelon, puis mes études à la Sorbonne, j’habite rue Joseph-Bara comme l’oncle Emmanuel… La liste des détails est troublante, maman.

— Peut-être… qui sait ? »

Un récit douloureux, poignant, qui trace de façon éloquente la vie en France sous le régime de Vichy et la question cruciale de l’identité. 

Il répond à un nécessaire devoir de transmission

Apolline Elter 

La carte postale, Anne Berest, roman, Ed. Grasset, août 2021, 512 pp

 

 

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