L’excessive

 

Chronique et billet de faveur qu’Alexandra Lapierre a bien voulu nous accorder :

 

L'excessive

 Aucune mention ne semble …excessive pour qualifier le coup de coeur contracté à la lecture de cette extravagante biographie.

Traçant le destin d’Elizabeth Chudleigh (1720-1788), devenue duchesse de Kingston au prix d’une bigamie tenue secrète,  Alexandra Lapierre nous entraîne, avec brio, dans les hautes sphères de l’aristocratie anglaise et européenne du Siècle des Lumières. Forte de quelques riches amitiés féminines, Augusta, Princesse de Galles, Maria-Antonia, Princesse électrice de Saxe et Catherine II de Russie, Elizabeth enflammera le coeur de nombreux hommes, des effets conjugués de sa beauté et d’un tempérament fort.

Elle vivra le grand amour de sa vie aux côtés du richissime duc de Kingston, Pair du Royaume, dont elle est la maîtresse dix-huit ans avant de consentir à l’épouser.

« Courte, drôle et saisissante » est la devise de cette aventurière, sportive, généreuse, courageuse, scandaleuse, « festoyante », dépensière, entière, sincère et …imprudente qui « se risqua à inventer son destin comme aucun romancier n’aurait osé le faire. »

Les caballes ne l’épargneront pas qui lui vaudront,  notamment,  un retentissant procès pour bigamie. Toujours, elle rebondira. Avec panache et une ardeur de vivre hors du commun.

« Elle restait fidèle à elle-même. Incapable de rancune, incapable de vengeance.

   Cet ultime retournement n’était que l’illustration des traits qui l’avaient caractérisée toute sa vie. La générosité. Et puis aussi le goût des grands gestes, l’obsession de la lumière, et la passion de la gloire. Le panache. »

Un ouvrage brillant, écrit d’une plume précise, imagée, nerveuse et sautillante, telle une polka qui invite à le lire d’une seule traite.

Et à regretter de le quitter.

Apolline Elter

L’excessive, Alexandra Lapierre, Plon, mai 2010, 258 pp, 19,5 €

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Billet de faveur

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Trois prolongations de lecture à vous soumettre, Alexandra Lapierre(Photo: Mantovani)  en vous remerciant de nous accorder la faveur d’un billet et d’une lecture si passionnante de votre ouvrage.

AE:     Vous l’affirmez, Elizabeth Chudleigh est un personnage romanesque comme on n’oserait l’inventer. La réalité dépasse la fiction. Fut-il pour autant aisé de retracer son histoire ?

Alexandra Lapierre: Oui… Et non. Aisé dans le sens où les actes d’ Elizabeth Chudleigh avaient été relatés par les journaux de l’époque. C’était une « star » avant la lettre, puisqu’elle était duchesse, belle, riche, étonnante et constamment scandaleuse. Pain béni pour les gazettes qui la suivaient à la trace dans tous ses déplacements… Et la Russie, la France, l’Angleterre, l’Italie : elle voyageait beaucoup, elle connaissait l’aristocratie de toutes les cours européennes ! Même Casanova l’évoque dans ses Mémoires… Sans parler des minutes du procès pour bigamie, où toutes les paroles d’Elizabeth sont retranscrites. Il existe donc des masses et des masses de documents. La difficulté a consisté dans leur dépouillement. Et surtout dans la description d’une Elizabeth, vue « de l’intérieur ». Les échotiers, qui relatent sa vie, les interprètent souvent avec les préjugés contre lesquels elle-même s’insurgeait. La difficulté a consisté à lui rendre son âme. Et sa liberté.

 

 AE: Une  femme de sa trempe a dû susciter bien des inimitiés féminines. Paradoxalement, ce sont les hommes qui se sont vengés d’elle ou l’ont lâchée.  Est-ce parce qu’elle portait atteinte à leur respectabilité ?

 

Alexandra Lapierre :  Absolument. Même si Elizabeth se conduit toujours et partout avec une noblesse inouïe, elle était tout sauf «  respectable », dans le sens social du mot… Quand elle devient duchesse de Kingston, une femme aussi libre et dénuée de préjugés menace, par son côté imprévisible, tous les fondements de la société. Je ne vous parle même pas du fait d’épouser deux hommes à la fois !

!

 

    AE: Il est question d’une enfant abandonnée dont elle fait sa filleule et prénomme Elizabeth. Que devient-elle par la suite ?

 

Alexandra Lapierre :  Je suis ravie que vous me posiez la question. J’avais fait beaucoup de recherches sur cette enfant qui grandira auprès de notre héroïne. Mais l’histoire de la jeune fille se termine mal : phtisique, elle disparaît très jeune.

 

Question rituelle de nos billets de faveur : si vous deviez évoquer un plat, une recette qui serait votre « madeleine de Proust », une saveur vous viendrait-elle d’emblée à l’esprit ?

 

Alexandra Lapierre :  Ce serait un petit coup de vin blanc italien, un vin qui pétille, avec de toutes petites bulles qui chatouillent la gorge… Le prosecco ! Sa saveur, son bruit, son parfum m’évoquent Rome et Venise, les apéros qu’on déguste sur les terrasses au pied des églises baroques, le soleil dans les yeux. Comme Elizabeth Chudleigh qui aimait beaucoup boire un petit coup de son vin favori dans les moments de joie. Elle, c’était du madère – en pêchant la truite sous la pluie d’Angleterre – avec son duc amoureux. Le goût du bonheur.

Mais encore:

Alexandra Lapierre était l’invitée de Laurent Dehossay, lundi 31 mai, à l’occasion de l’émission Culture Club (La Première – 12h à 13h) que je vous invite à podcaster, de Christine Pinchart (rtbf 2) dont vous découvrirez l’entretien en cliquant sur le site www.rtbf.be/culture, à la date du mardi 8 juin. Sans oublier l’interview de Camille Perotti, dans le supplément Lire de La Libre Belgique du lundi 7 juin, ni celui d’Edmond Morrel, posté le 2 juin, sur le site d’Espace Livres (lien au départ du blog)