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Un titre bref, percutant,  cinglant  pour un joyau de la rentrée littéraire… 2009 que nous aurions  raté s’il n’avait été proposé à la sélection 2012 du Prix des lecteurs (Jury du Livre de Poche). Nous ne pouvons qu’en bénir les organisateurs..

Née à Saïgon en 1968, Kim Thuy vit une prime enfance dorée au sein d’une famille fortunée. Elle en est extirpée en 1975 par l’arrivée des Communistes. S’ensuivent une brève et pénible cohabitation – la famille doit partager sa propriété – et l’exil vers le Canada parmi les boat-people

« La ville de Granby a été le ventre chaud qui nous a couvés durant notre première année au Canada. Les habitants de cette ville nous ont bercés un à un. Les élèves de mon école primaire faisaient la queue pour nous inviter chez eux pour le repas de midi.(…) Pendant toute une année, Granby a représenté le paradis terrestre. Je ne pouvais imaginer une meilleure place au monde, même si nous y étions mangés par les mouches autant que dans notre camp de réfugiés. »

Enfilant de  (très) courts chapitres, en un collier de souvenirs cruels, tendres et merveilleux, l’auteur rend avant tout hommage à sa famille, à ses parents qui ont changé drastiquement de condition sociale, ses oncles et tantes, désignés par leur numéro de fratrie, ses concitoyens vietnamiens et canadiens.

« Mes parents nous rappellent souvent, à mes frères et à moi, qu’ils n’auront pas d’argent à nous léguer en héritage, mais je crois qu’ils nous ont déjà légué la richesse de leur mémoire, qui nous permet de saisir la beauté d’une grappe de glycine, la fragilité d’un mot, la force de l’émerveillement. Plus encore, ils nous ont offert des pieds pour marcher jusqu’à nos rêves, jusqu’à l’infini »

 Magistral.

AE

Ru, Kim Thuy, témoignage, Ed Libre Expression (Canada), 2009 – Le Livre de Poche, avril 2012, 216 pp