Il pleuvait des oiseaux

il-pleuvait_couv1.jpgImpensable de conclure 2011 sans partager avec vous une belle, une très belle découverte. Ce coup de coeur, je le dois à Emmanuel Khérad et son émission radiophonique hebdomadaire – et hautement recommandable – La Librairie francophone* .

L’émission, diffusée le week-end du 19 et 20 novembre 2011, recevait la romancière québécoise Jocelyne Saucier, lauréate du dixième Prix des Cinq Continents, pour son roman, Il pleuvait des oiseaux.

Un roman?

Pas vraiment. Bien plutôt un récit aux allures de conte.

« L’histoire s’installe tranquillement. Rien ne se fait très vite au nord du 49e parallèle. Tom et Charlie commencent leurs journées en dépliant leurs membres endoloris par le sommeil puis se dirigent lentement vers le poêle pour l’attisée du matin et les patates aux lardons. »

Partie à la recherche du  peintre Ted Boychuck, un des derniers survivants des Grands Feux  de 1916, qui anéantirent, plusieurs villes du Grand Nord (le nord de l’Ontario, une photographe rencontre  ses compagnons d’ermitage, Charlie et Tom, deux vieillards qui ont décidé de fuir la vie civilisée et l’irrémédiable tyrannie du sort réservé aux personnes âgées.

  » A eux trois, ils ont formé un compagnonnage qui avait assez d’ampleur et de distance pour permettre à chacun de se croire seul sur sa planète »

Mais Ted est apparemment mort, qui emporte ses secrets avec lui.

Survient alors Gertrude, aussitôt baptisée Marie-Desneiges, qui renaît à la vie après 66 années passées dans une institution psychiatrique.

Et c’est cette nouvelle naissance, la possibilité d’une vraie vie, la rencontre de l’Amour et l’apprivoisement conjoint de la mort, « vieille  et [patiente] amie » qui rendent ce roman à ce point émouvant. La plume de Jocelyne Saucier, nourrie d’humanité, de tendresse introspective, de rythme et d’un sens neuf de l’image le rend …exceptionnel.

« La mort est une vieille amie. Ils en parlent à leur aise. Elle les suit de près depuis si longtemps qu’ils ont l’impression de sentir sa présence tapie quelque part, en attente, discrète le jour mais parfois envahissante la nuit. Leur conversation du matin est une façon de la tenir à distance. Dès qu’ils prononcent son nom, elle arrive, se mêle à la conversation, insiste, veut toute la place, et eux la rabrouent, s’en amusent, l’insultent parfois, puis la renvoient, et elle, bon chien, s’en retourne ronger son os dans son coin. Elle a tout son temps. »

Merci, Jocelyne Saucier

Apolline Elter

Il pleuvait des oiseaux, Jocelyne Saucier, roman,  Editions XYZ (Canada), coll. Romanichels, 1er trimestre 2011, 182 pp,

* La Librairie francophone, Emmanuel Khérad, émission hebdomadaire, diffusée les samedis et dimanches sur les ondes de France Inter (samedi 17h), de La Première (RTBF – dimanche 12h), de Radio Suisse romande et de Radio Canada