Eclats de vie…

Leurs vies éclatantes
 
POLET vies éclatantesPour son troisième roman, édité chez Gallimard, Grégoire Polet, a choisi un titre de lumière. Mais l’éclat de ces destins qui se croisent, six jours de mai, dans le quartier de Saint-Sulpice, à Paris, existe surtout, modestie métonymique, en ce qu’il jaillit de la plume de l’auteur. Nul doute aussi, qu’à force de se croiser, les protagonistes n’éclatent de leur quotidien, se rapprochent et créent des liens.
Si les préparatifs d’un enterrement, d’un mariage servent de trame narrative au roman, celui-ci enrichit le lecteur d’une multitude de pistes de réflexion philosophique – mine potentielle de sujets de dissertation – d’une connaissance mûrie des domaines de la musique et de la peinture. Car c’est bien la maturité, le trait dominant des romans de Grégoire Polet et l’on s’étonne, un zeste envieux, de l’âge délibérément jeune – 28 ans – de celui-ci.
Soulignons la densité expressive, infailliblement étudiée, de la plupart des descriptions, véritables joyaux picturaux.. Tels « Un tapis fleurdelisé, troué par endroits (…) pend dans le gouffre comme une immense langue sèche. » (p 233), « Sous le portique, parmi les gens qui gardent leurs distances, vêtus de tristesse et de discrétion, … » (pp 318-319), «Nour, ces cheveux noirs à reflets marron tombant sur ce visage et sur ces vingt-neuf ans, ce nez fin, ces narines un peu relevées, cette bouche un peu gonflée, cette tristesse qui regarde ses mains faites sans doute pour être fines (…) » (p 342).
Invitons le lecteur à prendre le temps de la lecture. A s’imprégner du rythme des personnages, des six chapitres et des six jours, ponctués des passages récurrents du bus 63 .
Et si nous suggérions, en toute subjectivité d’adéquation musicale, la (re)découverte de l’attachante Fantaisie en Fa mineur D 940 de Schubert, pétillante cousine du sublime concerto 23 de Mozart qu’interprétera Isabelle Crêtes.

Apolline Elter

« Leurs vies éclatantes », Grégoire Polet, Paris, Gallimard, août 2007, 471 pp, 21€.