Louise de La Vallière

Louise de La Vallière

Destin hors normes et émouvant que celui de Louise de La Vallière (1644-1710), favorite de la première heure de Louis XIV –  avant Les Montespan et Maintenon – amoureuse de l’homme plutôt que de sa fonction, retirée du monde, les trente-six dernières années de sa vie, sous le nom de « Soeur Louise de la Miséricorde », au sein du (Grand) Carmel de la rue Saint-Jacques, à Paris.

« Louise était là tout entière: ce mélange de douceur et de fermeté, de fragilité et de force, cette tendre faiblesse, cette calme obstination. »

La biographie que lui consacre Jean-Christian Petitfils, analytique et fouillée, est un monument du genre: à travers la personnalité, toute en nuance de l’héroïne, ce sont les relations entre les favorites, les courtisans  et le portrait , humain, finement brossé du souverain solaire qui se dégagent. Pour le plus grand intérêt du lecteur.

Frêle, pâle, de constitution délicate, affublée d’une légère claudication mais d’une très belle voix, Louise devait son charme à sa grâce plutôt qu’à sa beauté plutôt effacée. Utilisée comme « chandelier » pour masquer les amours d’Henriette d’Angleterre et de Louis XIV, elle enflamme  ingénument le coeur de ce dernier.

« Petite violette qui se cachait sous l’herbe… » dira la marquise de Sévigné, elle se verra peu à peu supplantée par la bouillante Montespan  – de chandelier, elle devient …paravent de la nouvelle et royale liaison – et élevée au rang de Duchesse de Vaujours. Cadeau de déclin dont le Roi est coutumier.

Lent écartement, plutôt que vraie rupture – « Le roi avait horreur des scènes » – la défaite de Louise est peu à peu consommée qui la mènera au Carmel.

« Une des raisons de la défaite de Louise, nous l’avons vu, venait de son incapacité à tenir le rang de favorite. Trop de qualités charmantes, pas assez de cynisme ni d’ambition Alors qu’elle ne songeait qu’à aimer et être aimée, il lui aurait fallu de l’assurance, de la morgue, l’art de faire valoir son crédit et sa fortune, celui d’acheter des créatures, de placer ses pions, de ménager les puissants, d’utiliser à bon escient le cercle des amis et des gens influents, toutes facultés dont Mme de Montespan saura user avec naturel, audace et entrain. »

Une crise mystique, survenue une nuit de printemps 1670, la convertit, sitôt l’effroi digéré, à la prière et aux valeurs essentielles de la vie. Restée dans un premier temps dans le monde, pour y témoigner de sa spiritualité, elle se retirera au Carmel de L’Incarnation (rue Saint-Jacques)  pour prendre le voile, le 4 juin 1675, en présence de la majeure partie de la Cour.

La correspondance échangée avec son ami, Maréchal Bernardin Gigault de Bellefonds et la publication anonyme, en 1680, des « Prières et reflexions sur la miséricorde de Dieu et sur notre misère après une grande maladie » (texte reproduit en annexe du livre) , rédigée de sa main, et abondamment plagiée,  constituent un précieux témoignage sur les tourments et aspirations de Soeur Louise de la Miséricorde:

« Attendez, attendez à me corriger que ma conversion soit au moins commencée et que ma pénitence balance un peu votre justice, afin qu’au lieu de me regarder comme une criminelle qui mérite la mort vous me considériez comme un enfant à qui vous voulez faire grâce. »

Apolline Elter

Louise de La Vallière, Jean-Christian Petitfils, ed. Perrin,(1990)  2002 et 2008, 390 pp,  +/- 22,5€