Sagan à toute allure

Ce qui fait le grand attrait de cette biographie de Françoise Sagan (1935-2004) c’est que ce n’en est pas une à proprement parler. Et l’auteure le revendique, évoquant l’idée d’un « kaleïdoscope », de moments saisis de la saga saganienne , pour pénétrer le coeur d’une femme qui l’avait grand. Une femme bougrement attachante en fait.

La première rencontre de Marie-Dominique Lelièvre avec l’écrivaine date de la fraîche publication d’Avec mon meilleur souvenir (Gallimard 1984), recueil d’anecdotes et de souvenirs de rencontres pétris de bienveillance. Je ne puis qu’appuyer cette recommandation de lecture.

Et l’éloge de sa plume au sens large :

« L’écriture est d’un naturel parfait, l’expression toujours juste: Françoise Sagan,
qui a bu au biberon toute la littérature classique, est la fille du roman 1820, son
intelligence concise vient de là. En matière littéraire, elle a l’oreille absolue.
Racine, Voltaire, Stendhal, Madame de La Fayette : le mot et l’idée, un point c’est
tout. Tout est dit en peu de mots. Rien n’est tombé du ciel, elle a absorbé un
précoce capital de lectures. Elle a lu, elle a senti, elle a aimé les grands auteurs
classiques à un âge si tendre, dans un tel état de réceptivité, que leur saveur s’est
incorporée dans son génome. Ses synapses bien nourries sont formées sur ce
modèle. »

Repérée par René Julliard qui se précipite pour accepter le manuscrit de Bonjour Tristesse (1954), Françoise Quoirez devient Sagan, lauréate du Prix de la critique et, contre toute attente, de l’estime de François Mauriac.

Riche, célèbre et encore mineure, Françoise devient la proie de sa légende et de cette nonchalance désinvolte, quelque peu androgyne qui fait son charisme. Sans oublier son addiction au jeu, aux belles voitures et à la vitesse corollaire, quand ce n’est à la drogue suite à l’ingestion massive de Palfium après son terrible accident de voiture du 13 avril 1957.

Prompte à se donner en amitié et en amour – citons Michel Magne, Bernard Frank, Jacques Chazot,  Jean-Paul Sartre Guy Schoeller, Robert Westhoff, Clara Malraux, son amie à vie, Peggy Roche, la femme de sa vie, … « Kiki » comme la surnomme sa famille est prodigue de son argent, qui vient peu à peu à lui manquer totalement, la laissant sur la paille totale à la fin de sa vie, avec une succession largement déficitaire. Son fils Denis Westhoff en acceptera l’immense passif aux fins de récupérer tous les droits sur les textes de sa mère et poursuivre de la sorte la vie de son œuvre.

Pudique sur ses sentiments, intègre dans ses relations aux autres, Françoise traverse des périodes de doute et une forte dépression

« La figure emblématique des années 60 a la gueule de bois » 

Elle reste , en revanche, entourée de personnes qui ne lui veulent que bien et il en est ainsi, heureusement, de sa postérité

Je vous recommande la lecture de cet essai, subjuguée par la lecture audiolivresque idoine, portée, incarnée par Léonore Bossière. Qu’elle en soit félicitée

Apolline Elter

Sagan à toute allure, Marie-Dominique Lelièvre, essai, Ed. Denoël 2008 & 2025 – Ed Thélème, septembre 2025, texte intégral lu par Léonore Boissière, durée d’écoute 8h 55 min.

 

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